Century 51

Publié le par Aurrelli


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Chérinou et moi même nous sommes lancés à corps perdu, les yeux fermés, tête baissée dans la recherche de notre futur chez nous qui devra avoir trois chambres, un petit bout de jardin et ,sivoupléééééé une cheminée, même toute petite hein, ça chauffe quand même et puis ça sent trop trop bon... 
Nous nous lançâmes d'ailleurs tellement fort que, non, nous ne nous primes pas de mur, mais que l'esprit aiguisé de mon père s'imagina, au regard de la frénésie frétillante qui nous habitait, être grand-père dans les mois à venir. Mais c'était mal nous connaître, nul besoin d'une échéance quelconque pour passer du désintérêt le plus grand pour le marché immobilier au harcèlement téléphonique de toutes les agences immobilières du Var, il suffisait de décider de s'y mettre !

Nous commençons à accumuler les visites.. les coups de coeur... et les jolies surprises qui, en caricaturant un peu (mais pas trop), ressemblent à : le stylo à la main, la main levée prête à apposer la définitive signature, quand le geste est arrêté par le croisement de deux TGV lancés à pleine vitesse ... au bout du jardin...

Bref en trois mots et demi: c'est pas gagné

Rien que du très normal jusque là, rien d'autre que les banales joies de tout à chacun lancé dans la recherche du nid d'amour parfait au prix le plus bas avec le moins de travaux possibles et des grandes pièces et sivoupléééééé une cheminée même petite, parce que même petite ça fera l'affaire...

Mais hier nous avons pu, Chérinou et moi même, découvrir avec un bouleversement ébahi et ému, l'agent immobilier à abattre, celui qui pourrait te faire partir avant même d'avoir eu la moindre info sur la maison à visiter.
Ça aurait pu bien commencer, ouverture de la porte de l'agence, serrage de main, grand sourire... mais ça s'est arrêté là.
Il nous a été proposé de prendre un verre d'apéro avec toute l'équipe histoire de fêter le dernier jour de l'année, après notre poli refus (c'est pas qu'on est contre, mais à 10h30 du mat' le 31 décembre, on s'est dit que ça faisait un peu tôt pour commencer...), arrivée du patron, bronzé, chemise ouverte sur son torse tout de blanc velu, au creux duquel se cachait une discrète médaille dorée qui devait bien peser 2 ou 3 kilos tout mouillé, au bout d'une toute aussi discrète chaîne. Une fois faite la description par le menu de l'enthousiasme du couple de la veille qui venait juste de visiter cette même maison, histoire que nous ayons déjà envie de nous battre sauvagement à coup de surenchère sonnante et trébuchante, nous pûmes partir visiter la dite maison. L'agent immobilier nous demanda fort légitiment de l'attendre quelques secondes, le temps qu'il finisse cul sec son pastis tout juste servi... On n'aurait pas voulu l'en priver.
Après quelques mètres en voiture  et sentant certainement que nous ne savions pas encore si nous devions partir tout de suite ou attendre un peu , il nous demanda de l'excuser si aujourd'hui il n'était pas complètement au top, mais qu'il souffrait d'un affreux mal de crâne rapport à la cuite qu'il s'était prise la veille avec son patron qui avait vendu 2 maisons en une journée...

Chérinou qui n'en pouvait plus de ne pas avoir fumé pendant les 3 minutes du trajet, se précipita pour s'allumer une cigarette sitôt sorti de la voiture, avant de se rendre compte à son grand désespoir qu'il allait lui falloir l'éteindre rapport au fait qu'on allait rentrer dans la maison. A son grand soulagement, notre agent immobilier préféré le rassura "Oh bah non, allez-y, vous pouvez fumer, t'façon la dame est mor... décédée alors c'est pas elle qui viendra vous engueuler si vous fumez chez elle hein", lança-t-il dans un franc sourire de commercial ayant mal au cheveux et sentant l'alcool. Sans doute par peur des fantômes, ou peut-être par respect Chérinou préféra quand même éteindre sa cigarette avant de rentrer, temps pendant lequel notre bon ami s'employa à me demander si nous étions propriétaires, où se trouvait notre appartement, à combien nous le vendions, à connaître le nombre de pièces et la superficie du jardin , à me dire que c'était bien intéressant et enfin à me demander s'il pourrait venir le voir pour le mettre dans son agence.
A mon regard il préféra ne pas attendre la réponse et se lança dans un flot absolument ininterrompu de paroles pour accompagner la visite de chaque pièce. Il prit soin de nous rassurer, entre deux bouffées de cigarette, en précisant que toutes les affaires de la mémé allaient partir à la benne, qu'il avait un mec pour ça qui allait s'occuper de tout, que quand on reviendrait tous les cadres de photos de famille, le verre posé sur le lavabo avec la brosse à dent encore dedans, les lunettes posées sur la table comme pour y être reprises quelques minutes après par une vielle dame qui ne reviendrait pas, tout ça serait foutu en l'air en vrac, à la déchetterie.
On en aurais pleuré...

Finalement on ne se souvient pratiquement pas de la maison...
mais une chose est sûre,  on ne la prendra pas...

Publié dans Causette

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M
<br /> Mais c'est terrible de balancer une vie comme ça à la poubelle... Je me rappelle qu'on a passer une semaine à temps plein quand la grand mère de mon homme est dcd pour ranger et distribuer ses<br /> affaires, on en a découvert des trésors et des moments de bonheur....<br /> <br /> <br />
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A
<br /> <br /> Oui, je trouve aussi, chaque détail parlait d'une vie toute entière, ça fendait le coeur...<br /> <br /> <br /> <br />
K
<br /> que je suis contente de te lire! je comprends pas, je n'ai pas été prevenue des autres parutions...<br /> ba! moi non plus je la prendrait pas c'te maison!<br /> plein de bisous et bonne annnée ma belle<br /> <br /> <br />
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A
<br /> <br /> Merci Kat, une magnifique année à toi et à toute ta petite tribue <br /> <br /> <br /> <br />
P
<br /> <br /> Yahou! Trop contente de retrouver les aventures d' Aurrelli, son Chérinou et son chat -peint en cette circonstance, mais en tout cas toujours aussi chat -pitre.<br /> <br /> <br /> <br />
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A
<br /> <br /> La suite au prochain épisode tain tain tain<br /> <br /> <br /> <br />